Chasse et défense de l’environnement font-elles bon ménage ?

La Fédération de chasse utilise une grande partie de son budget de 2 millions d’euros pour mener à bien des actions de préservation de l’environnement. Une nouvelle vocation pas forcément au goût de tous


Un changement de cap ? Depuis quelques années, la Fédération de chasse du Jura a pris une nouvelle dimension. De gestionnaire du patrimoine cynégétique, elle se transforme, peu à peu, en prestataire de service pour la réalisation d’enquêtes sur la faune et la flore du Jura. Agréée au titre de la protection de la nature depuis 1979, elle se définit aussi comme « association de défense de l’environnement ».

Actions dans les écoles, acquisitions foncières, études, réhabilitations d’étangs… Au début des années 2000, la Fédération de chasse a fait évoluer ses activités. Elle a par exemple été chargée par le Conseil général, voici peu, d’effectuer l’inventaire des zones humides du département. Une mission pour laquelle elle touchera 450 000 euros sur trois ans.

Entreprise de communication pour changer l’image des chasseurs ? Vraie prise de conscience ? Peut-être un peu des deux.

« Nous n’avons effectivement pas peur d’entrer en concurrence avec les bureaux d’étude pour des missions de sauvegarde l’environnement. Aujourd’hui, le fonctionnement de la fédération est plus proche de celui d’une petite entreprise que d’une association, indique Christian Lagalice, le président de la fédération de chasse du Jura. Notre activité cynégétique nous amène à ne plus simplement être des porteurs de fusil. Nous ne pourrions consacrer notre budget qu’à des lâchers de gibier. Nous ne faisons pas ça pour changer la représentation que le grand public se fait des chasseurs, mais si cela aide, tant mieux. »

« Nous avons effectivement du mal à nous défaire de cette image de « galinette cendrée » véhiculée par le sketch des Inconnus, poursuit-il. Mais la préservation de l’environnement est l’affaire de tous, dont les chasseurs. Ce qui profite au gibier profite aussi à la biodiversité. »

Confrontée à l’érosion du nombre de chasseurs dans le Jura, une baisse de 1 % par an, et donc du nombre de cotisations, la fédération cherche aussi à diversifier ses activités pour s’assurer des revenus.

Mais monde de la chasse et défense de l’environnement font-elles bon ménage ? Pour les associations et les élus écologistes, assurément non. Pour d’autres, comme le Conseil général, oui. Deux visions de la gestion du patrimoine faunistique et floristique s’affrontent : régulation et interventionnisme, une position assumée par la fédération de chasse, contre sanctuarisation.

« Il ne faut pas oublier qu’ils sont chasseurs. Ils ne peuvent pas être neutres, objectifs, estime Brigitte Monnet élue Europe-Ecologie et conseillère régionale. Ils ne peuvent pas être impartiaux dans leurs actions d’éducation à l’environnement. Ils ont évidemment intérêt à préserver l’environnement. Ils sont sincères dans leurs démarches. Mais tout est fait en fonction du gibier, avec cette arrière-pensée. Une association écologiste à qui on donnerait les mêmes moyens effectuerait le même travail mais sans autre intérêt que celui de la préservation de l’environnement. les chasseurs ont de l’argent, ce qui leur permet de répondre à des appels à projet facilement. »

Même son de cloche chez Vincent Dams, salarié de Jura Nature Environnement : « Les actions de préservation de la nature doivent profiter à l’intérêt général. Là, je suis sceptique quant aux buts poursuivis par la fédération de chasse. Leur objectif reste la chasse. Comment, par exemple, peut-on faire l’inventaire des zones humides du Jura et ensuite se prononcer contre un projet de parc national censé préserver ces zones ? »

« La gestion cynégétique n’a qu’un recul de 30 ou 40 ans. Ce n’est pas forcément suffisant. Les chasseurs se préoccupent-ils des libellules, de la flore ? Il manque de dialogue, de concertation. »

Ce dernier nuance malgré tout : « Pendant longtemps, dans le Jura, les chasseurs ont été les seuls sur ce terrain de la préservation de l’environnement. Ils ont été les seuls interlocuteurs du Conseil général par exemple. C’est aussi aux associations de faire leurs preuves, de montrer qu’elles sont capables de mettre en œuvre des actions de protection de la nature. D’être crédible. »

Un avis partagé par Jean Raquin, le président du conseil général, chasseur lui-même : « Ce sont eux qui assurent le meilleur maillage du territoire. Ils ont la connaissance du terrain en témoigne leur travail sur les zones humides. C’est du temps de gagné pour nous. »

Le goupil a écrit:Effectivement, s'il n'y avait que les écolos-dingos pour s'occuper des zones humides et de tout ce qui touche à l'environnement de terrain... ce s'rait pas joli.

Ces personnes sont très fortes derrière un bureau ou un objectif d'appareil photo dans un observatoire créé pour observer les animaux (veulent pas trop se salir les pieds)... mais sur le "vrai" terrain... y'a plus grand monde...