- BIB34Perdreau
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L'autre coté du Miroir
Ven 8 Jan 2021 - 17:33
L’AUTRE COTE DU MIROIR
Ne pas désespérer, toujours croire à ce foie immuable, qui nous pousse à rechercher en permanence, le meilleur territoire de chasse, le meilleur chien, qui lors de ces fins d'après-midi de bredouille nous pousse à faire la dernière remise, celle qui est tout là-haut sous les sapins, celle sur qui tous nos espoirs reposent et qui une fois faite ne laissera aucun regret malgré la place vide, mais le remord de ne pas avoir le temps de faire la suivante.
Comment expliquer cela à la personne qui est en face de moi, à ce repas professionnel trop long et trop ennuyeux. Comment lui faire comprendre cette passion qui tous les dimanches m’amènent loin des miens, malgré et surtout avec une météo "à ne pas mettre un chien dehors", car bien évidemment dans ces repas professionnels où les gens bien-pensants regardent les chasseurs comme des pestiférés, ou le politiquement correct prends place aux réelles convictions de chacun, il y a toujours un malin, qui connaissant m'on addiction, qui lance à tue-tête :
" Alors cette chasse, vous en avez tué beaucoup de gibier cette année ?"
J'ai tellement vécu ce genre de situation, que ma philosophie à une certaine tendance à s'émousser. Pendant combien d’année j’ai essayé de convaincre l'auditoire du bienfondé de la chasse, de ses valeurs culturelles, de sa place dans l'histoire de l'humanité, à user une énergie immense à défendre mon idéal.
Alors bien évidemment, surtout ne pas tomber dans la provocation ou l'idéologie mal placée, mais ce soir, la fatigue l'emporte sur la raison et sans grande réflexion je lance :
" Du gibier oui, mais pas assez de vététistes…"
Un ange passa… Et au regard de mon voisin je compris que j'avais dégainé un peu trop vite, car l'auteur de la question n'était d'autre que mon plus gros client...…..grand amateur de la petite reine des sous-bois.
Je venais en une seconde, de mettre en péril, plusieurs années d’acharnement professionnel, je venais de me tirer un ARX dans les fesses (pour être polis). Mon client surpris de ma répartie, fronça les sourcils et me jeta un regard dans lequel je pouvais voir mes futurs contrats s'envoler.
Comment récupérer cette énorme bourde ? Bien évidemment en ayant recours à l'humour et m'empressant de rajouter :
" ah ah c'est de l'humour bien sûr…je pense que vous avez compris"
Ma petite phrase déclenchât l'hilarité le l’assistance, non pas qu'ils fussent bon public, mais surtout contient de l’embarras dans lequel je venais de me plonger…
Bien évidemment que je rigolais, bien évidemment que je ne pensais pas un traître mot de ma repartie, mais comme dans toutes communications, il y a le sens et il y a la forme, et même si mon entourage connaissait mon agacement à discuter de ma passion, comme on discute de la météo, mon client, lui, ne comprenait pas cette charge à la hussarde de ma part.
Alors comme dans toute négociation, la meilleure défense étant l'attaque, je m'empressais d'aller sur son terrain et vanter les bienfaits du vélo.
- Ah vous faites du vélo ? Me questionna t il
- Bien sûr !! rétorquais-je
- Alors permettez mois de vous inviter ce dimanche à une petite sortie entre amis
- Mais bien avec plaisirs…Ouf…pensais-je...je venais de récupérer la situation
Le dimanche matin à l'heure et lieu convenu, je l'attendais. N'ayant pas de VTT, je m’étais empressé la veille de m’en faire prêter un et acheter tout le matériel du parfait vététiste et afin de paraître crédible j'avais mis un point d'honneur à acheter selon le vendeur...... ce qui se faisait de mieux en matière de VTT.
A son arrivée, le bonjour fut froid et c'est sans grand discours, que je tentais de suivre le peloton. Arrivé à la croisée d'une allée, un panneau " chasse en cour" barrait le chemin, quelques vociférations et le petit groupe bifurqua à droite, quelques kilomètres plus tard un autre panneau nous barrait le passage, puis plus tard c'est un chasseur posté qui sans grand ménagement nous demanda de quitter les lieux en argumentant qu’eux payaient un droit de chasse et que la forêt leurs appartenait. Personne dans le groupe ne disait mots mais je sentais une certaine pression qui montait à chaque tour de roue.
Au fur et à mesure que les kilomètres se déroulaient, je découvrais l'autre côté du miroir celui des autres utilisateurs de nos forêts, celui où la bêtise n'ayant pas de maître, je me retrouvais confronté à l'image que nous offrons à l'opinion. Cette image écornée par tant d'artistes plus ou moins drôles, ou politique en mal d’électorat, mais ne s'étaient-ils pas inspirés tout simplement de la vérité… ?
La rage me faisait mal au ventre, et la honte m'envahissait. Arrivé à la voiture, mes jambes tremblaient de fatigue et le souffle me manquait cruellement, entre deux respirations je tentais de détendre l'atmosphère en plaisantant sur mon état de fatigue mais l'ambiance générale restait tendue.
Mon client se rapprocha de moi et me dit dans un petit sourire
- On a eu de la chance ce matin, on s'en sort tous vivants
Je repris un air sérieux et répliquais
- Je conviens qu'effectivement la pratique de votre passion, se complique un peu par temps de chasse et que si je ne pratiquais pas moi-même, et à la vue de ce que nous avons vécu ce matin, je serais très certainement un anti chasse acharné, aussi pour essayer de redorer le blason de mon sport favori, laissez-moi vous inviter à mon tour à une petite partie de chasse.
Et à ma surprise il accepta.
Rendez-vous fut pris, pour le dimanche suivant, et quand il arriva, je pensais qu’il avait dû tomber sur le même vendeur que moi la semaine précédente, version "rayon chasse », car à part le fusil, son accoutrement était complet.
La matinée était parfaite, le vent était tombé, nous étions en fin de lune et les ruisseaux s'étaient gonflés des pluies précédentes. Je l'accueillais en toute décontraction et lui expliquais les rudiments de notre loisir favori.
Les chiens très rapidement en action, nous faisaient régaler d’un balai parfaitement orchestré, croisant et décroisant leurs quêtes à une vitesse phénoménale, très tôt le premier fut mis sur l'aile, puis un second, mon client me suivait avec grande difficulté dans le dédale de buis et de chêne blanc que nous offre nos contreforts du LARZAC.
Sur un petit promontoire les 3 chiens se bloquaient dans un patron magnifique autour d'une petite "mate" de buis, doucement je plaçais mon client à une extrémité et allais me placer à l'autre. Bien que fournis, le taillis n'était pas bien haut et je pouvais voir très distinctement mon client qui regardait les chiens immobiles tels des statuts de sel.
Soudain son regard me fixa et sa bouche me dit sans que ne sorte de son :
- Elle est là !
Je compris qu'il la voyait, et que ce moment magique le subjuguait complètement. Je ne sais combien de temps cela a duré, mais au bout d'un bon moment l'oiseau s'envola, me passa en me fixant au-dessus de la tête, sans que je n'esquive le moindre geste.
Mon client me cria :
- A vous.......mais pourquoi n'avez-vous pas tiré ?
- Mais parce qu'elle n'était pas en vélo, lui répondis-je du tac au tac
Un fou rire nous pris, qui dura longtemps. Les chiens nous regardaient, ne comprenant pas tout et surtout pensant que nous avions sombré dans la folie.
Quand le calme revint, il me raconta que l’oiseau était sorti du buisson, était venu faire un petit tour sur le bout de ses souliers, puis avait effectué une petite roue pour le saluer avant de prendre son envol. Ses yeux brillaient et son sourire me fit comprendre que l'avenir de nos relations s'éclaircissait, la belle avait fait son effet.
Cette petite histoire a déjà quelques années et depuis il ne se passe pas une saison sans que nous ne faisions pas quelques sorties au bois, tantôt avec mes chiens, tantôt à VTT.
Depuis je regarde les autres utilisateurs de nos territoires d'un autre œil et lors de ces repas toujours aussi ennuyants, je tourne 7 fois ma langue dans la bouche avant de répondre à cette éternelle question :
- alors cette chasse.......
04 Février 2014
Ne pas désespérer, toujours croire à ce foie immuable, qui nous pousse à rechercher en permanence, le meilleur territoire de chasse, le meilleur chien, qui lors de ces fins d'après-midi de bredouille nous pousse à faire la dernière remise, celle qui est tout là-haut sous les sapins, celle sur qui tous nos espoirs reposent et qui une fois faite ne laissera aucun regret malgré la place vide, mais le remord de ne pas avoir le temps de faire la suivante.
Comment expliquer cela à la personne qui est en face de moi, à ce repas professionnel trop long et trop ennuyeux. Comment lui faire comprendre cette passion qui tous les dimanches m’amènent loin des miens, malgré et surtout avec une météo "à ne pas mettre un chien dehors", car bien évidemment dans ces repas professionnels où les gens bien-pensants regardent les chasseurs comme des pestiférés, ou le politiquement correct prends place aux réelles convictions de chacun, il y a toujours un malin, qui connaissant m'on addiction, qui lance à tue-tête :
" Alors cette chasse, vous en avez tué beaucoup de gibier cette année ?"
J'ai tellement vécu ce genre de situation, que ma philosophie à une certaine tendance à s'émousser. Pendant combien d’année j’ai essayé de convaincre l'auditoire du bienfondé de la chasse, de ses valeurs culturelles, de sa place dans l'histoire de l'humanité, à user une énergie immense à défendre mon idéal.
Alors bien évidemment, surtout ne pas tomber dans la provocation ou l'idéologie mal placée, mais ce soir, la fatigue l'emporte sur la raison et sans grande réflexion je lance :
" Du gibier oui, mais pas assez de vététistes…"
Un ange passa… Et au regard de mon voisin je compris que j'avais dégainé un peu trop vite, car l'auteur de la question n'était d'autre que mon plus gros client...…..grand amateur de la petite reine des sous-bois.
Je venais en une seconde, de mettre en péril, plusieurs années d’acharnement professionnel, je venais de me tirer un ARX dans les fesses (pour être polis). Mon client surpris de ma répartie, fronça les sourcils et me jeta un regard dans lequel je pouvais voir mes futurs contrats s'envoler.
Comment récupérer cette énorme bourde ? Bien évidemment en ayant recours à l'humour et m'empressant de rajouter :
" ah ah c'est de l'humour bien sûr…je pense que vous avez compris"
Ma petite phrase déclenchât l'hilarité le l’assistance, non pas qu'ils fussent bon public, mais surtout contient de l’embarras dans lequel je venais de me plonger…
Bien évidemment que je rigolais, bien évidemment que je ne pensais pas un traître mot de ma repartie, mais comme dans toutes communications, il y a le sens et il y a la forme, et même si mon entourage connaissait mon agacement à discuter de ma passion, comme on discute de la météo, mon client, lui, ne comprenait pas cette charge à la hussarde de ma part.
Alors comme dans toute négociation, la meilleure défense étant l'attaque, je m'empressais d'aller sur son terrain et vanter les bienfaits du vélo.
- Ah vous faites du vélo ? Me questionna t il
- Bien sûr !! rétorquais-je
- Alors permettez mois de vous inviter ce dimanche à une petite sortie entre amis
- Mais bien avec plaisirs…Ouf…pensais-je...je venais de récupérer la situation
Le dimanche matin à l'heure et lieu convenu, je l'attendais. N'ayant pas de VTT, je m’étais empressé la veille de m’en faire prêter un et acheter tout le matériel du parfait vététiste et afin de paraître crédible j'avais mis un point d'honneur à acheter selon le vendeur...... ce qui se faisait de mieux en matière de VTT.
A son arrivée, le bonjour fut froid et c'est sans grand discours, que je tentais de suivre le peloton. Arrivé à la croisée d'une allée, un panneau " chasse en cour" barrait le chemin, quelques vociférations et le petit groupe bifurqua à droite, quelques kilomètres plus tard un autre panneau nous barrait le passage, puis plus tard c'est un chasseur posté qui sans grand ménagement nous demanda de quitter les lieux en argumentant qu’eux payaient un droit de chasse et que la forêt leurs appartenait. Personne dans le groupe ne disait mots mais je sentais une certaine pression qui montait à chaque tour de roue.
Au fur et à mesure que les kilomètres se déroulaient, je découvrais l'autre côté du miroir celui des autres utilisateurs de nos forêts, celui où la bêtise n'ayant pas de maître, je me retrouvais confronté à l'image que nous offrons à l'opinion. Cette image écornée par tant d'artistes plus ou moins drôles, ou politique en mal d’électorat, mais ne s'étaient-ils pas inspirés tout simplement de la vérité… ?
La rage me faisait mal au ventre, et la honte m'envahissait. Arrivé à la voiture, mes jambes tremblaient de fatigue et le souffle me manquait cruellement, entre deux respirations je tentais de détendre l'atmosphère en plaisantant sur mon état de fatigue mais l'ambiance générale restait tendue.
Mon client se rapprocha de moi et me dit dans un petit sourire
- On a eu de la chance ce matin, on s'en sort tous vivants
Je repris un air sérieux et répliquais
- Je conviens qu'effectivement la pratique de votre passion, se complique un peu par temps de chasse et que si je ne pratiquais pas moi-même, et à la vue de ce que nous avons vécu ce matin, je serais très certainement un anti chasse acharné, aussi pour essayer de redorer le blason de mon sport favori, laissez-moi vous inviter à mon tour à une petite partie de chasse.
Et à ma surprise il accepta.
Rendez-vous fut pris, pour le dimanche suivant, et quand il arriva, je pensais qu’il avait dû tomber sur le même vendeur que moi la semaine précédente, version "rayon chasse », car à part le fusil, son accoutrement était complet.
La matinée était parfaite, le vent était tombé, nous étions en fin de lune et les ruisseaux s'étaient gonflés des pluies précédentes. Je l'accueillais en toute décontraction et lui expliquais les rudiments de notre loisir favori.
Les chiens très rapidement en action, nous faisaient régaler d’un balai parfaitement orchestré, croisant et décroisant leurs quêtes à une vitesse phénoménale, très tôt le premier fut mis sur l'aile, puis un second, mon client me suivait avec grande difficulté dans le dédale de buis et de chêne blanc que nous offre nos contreforts du LARZAC.
Sur un petit promontoire les 3 chiens se bloquaient dans un patron magnifique autour d'une petite "mate" de buis, doucement je plaçais mon client à une extrémité et allais me placer à l'autre. Bien que fournis, le taillis n'était pas bien haut et je pouvais voir très distinctement mon client qui regardait les chiens immobiles tels des statuts de sel.
Soudain son regard me fixa et sa bouche me dit sans que ne sorte de son :
- Elle est là !
Je compris qu'il la voyait, et que ce moment magique le subjuguait complètement. Je ne sais combien de temps cela a duré, mais au bout d'un bon moment l'oiseau s'envola, me passa en me fixant au-dessus de la tête, sans que je n'esquive le moindre geste.
Mon client me cria :
- A vous.......mais pourquoi n'avez-vous pas tiré ?
- Mais parce qu'elle n'était pas en vélo, lui répondis-je du tac au tac
Un fou rire nous pris, qui dura longtemps. Les chiens nous regardaient, ne comprenant pas tout et surtout pensant que nous avions sombré dans la folie.
Quand le calme revint, il me raconta que l’oiseau était sorti du buisson, était venu faire un petit tour sur le bout de ses souliers, puis avait effectué une petite roue pour le saluer avant de prendre son envol. Ses yeux brillaient et son sourire me fit comprendre que l'avenir de nos relations s'éclaircissait, la belle avait fait son effet.
Cette petite histoire a déjà quelques années et depuis il ne se passe pas une saison sans que nous ne faisions pas quelques sorties au bois, tantôt avec mes chiens, tantôt à VTT.
Depuis je regarde les autres utilisateurs de nos territoires d'un autre œil et lors de ces repas toujours aussi ennuyants, je tourne 7 fois ma langue dans la bouche avant de répondre à cette éternelle question :
- alors cette chasse.......
04 Février 2014
titou 66, Procyon lotor, budbud, jo23, Toto63, Néos et Mattr05 aiment ce message
- GERDEAUCerf1000 Messages
- Nombre de messages : 1437
Age : 69
Localisation : ST LO
Date d'inscription : 16/03/2020
Re: L'autre coté du Miroir
Ven 8 Jan 2021 - 21:35
Très joli récit @BIB34, c'est certain qu'un petit effort de communication des deux côtés arrangerait souvent les choses , mais pas facile à mettre en oeuvre...
- jeanluc36Cerf1000 Messages
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Age : 67
Localisation : Velles (36) ou Cunlhat (63)
Date d'inscription : 21/12/2018
Re: L'autre coté du Miroir
Ven 8 Jan 2021 - 21:43
Non , pas facile du tout
_________________
La chasse , c' est comme la guerre ... La seule différence , c' est qu' à la chasse il n' y a pas de prisonniers !
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