Adrénaline....

Une petite histoire qui m'est arrivé dimanche dernier:

Dimanche matin 7h.
Le réveil sonne, j'ai la tête comme une coucourde. Si encore j'avais fait la fête ou des abus la veille je comprendrais mais là, pas du tout.
Moralité: j'aurais du boire et faire la fête, au moins je saurais pourquoi j'ai mal à la tête

7h30: 1 douche et un café plus tard je saute dans la voiture et j'arrive au rendez vous. Sans déconner, c'est le panard de pouvoir se lever et d'aller au rendez vous de chasse en 5mn. ça me change des 2h habituelles de quand je descend chasser en Ardeche depuis Lyon  

Il "plausigne" et on attends les fadas qui veulent quand même aller chasser malgré la pluie.
A 8h30 on est 13. Il va falloir faire avec, alors on pars tous faire le pied en espérant trouver des sangliers remisés sur des petits coins facile à chasser.

10h30: retour au cabanon. Il ne pleut plus et à la vue du ciel il ne devrait plus pleuvoir. Voilà au moins une bonne nouvelle car au fur et à mesure que les gens rentrent de faire le pied c'est négatif.
On attend encore deux personnes qui ne sont pas rentrés et on espère qu'ils auront quelque chose.

11h30: les chiens ayant éventés des animaux dans un grand ruisseau, on s'est posté autour. A deux l'on tient quasiment 400m de pente.

11h45: Quelques détonations de l'autre coté de la montagne et une menée qui s’arrête nette. Au bilan un renard de tué, 3 chevreuils de levés (mais plus de bracelets) mais aucun sanglier.

12h15 : fin de battue, on se retrouve tous à la cime d'un col. On ne sait plus où aller, ni si on arrête ou si on tente autre chose.
Bruno (un des piqueurs) nous pousse pour aller faire Vermès. Le problème c'est qu'à 9 postés, il va y avoir de sacrés trous dans les lignes....

13h : après avoir redonné les consignes et donné les postes, on est 10 à se poster là ou en temps normal on du mal à fermer la traque à 40.
Je suis posté au mirador de la chaise bleue. Vous l'aurez tous devinés, il porte ce nom car il a une chaise à demeure de couleur rouge    Elle a été repeinte à la bombe il y a quelques années car elle commencée à rouiller mais le nom est resté

En temps normal sur ma ligne: il y a 4 miradors pour environs 600m à couvrir. Je n'ai personne avec moi sur la ligne et je peux tirer à 360 degrés. Je suis au poste le plus haut dans la pente là où c'est le plus touffu.
La pente ou je suis posté est une ancienne coupe où il repousse des chênes verts et des pins d'environs 2m50/3m de haut.
La végétation est donc très dense avec des petits clairs d'ici de là.

15h: en dehors de quads et de motos en tout genre qui ont l'obligeance de faire demi tour en voyant nos panneaux indiquant la battue (c'est tellement rare que je voulais le signifier ) , je n'ai strictement rien entendu. Pas un coup de trompe, pas un chien.

15hxx: un chien sur le haut de la pente. Puis deux, trois, c'est toute une meute qui mène sur le plateau à bien 8 ou 900m de moi.
D'un coup, plus de bruit ils ont dû replonger vers l'autre coté du plateau.

15h40: J'entends à nouveau les chiens. S'ils continuent tout droit ils vont prendre la pente, ça sera peut être pour moi en fin de compte.    Un craquement dans mon dos me fait me retourner. A 70m environ un sanglier pointe le bout de son nez en bordure de vigne. Je place le point rouge au niveau du groin et attends qu'il sorte pour l'ajuster. Un puis deux marassous sortent dans la vigne suivi de prêt par la laie.Je baisse la carabine et profite du spectacle avant de plonger le nez dans mon sac pour prendre mes laisses et arrêter les chiens.

Moins de 5mn plus tard un bruit de craquement lointain me rappelle à l'ordre: je lâche les laisses remonte dans le mirador, réarme ma carabine et attends. J'entre aperçoit un sanglier entre deux chêne vert à bien 200m de moi mais impossible de tirer. Ils ne sont pas pour moi ils vont passer au poste du bas. Seul sur la ligne, je positionne le point rouge dans un clair et attends, espérant en voir passer un pour lui lâcher une balle.
J'ai de la chance, un joli sanglier sort, je lache une balle qui, il me semble tape au dessus et là.... j'entends toute une compagnie remonter vers moi dans le ruisseau qui longe la vigne. A un moment ou à un autre j'en verrais forcément un que je pourrais tirer.
La compagnie se bloque dans le ruisseau en bordure de vigne, hésitante à franchir le découvert.
J'attends, le cœur battant la chamade.

Un premier sanglier sort suivi dans la même seconde par un second.
La carabine monte à l'épaule, le point rouge vient se placer sur l'épaule, le coup claque et le sanglier s’effondre (un petit mâle de 38kg).
Le coup de carabine marque le début de la débandade. La compagnie s'éclate en sortant du ruisseau, il en court un peu partout.
Je choisi ma cible, un petit sanglier qui me vient de 3/4 face. BLAM! Touché au cou, la balle ressortant de l'autre coté au niveau des reins, il est séché net sur place et s’effondre dans ses traces. (Petite femelle de 42kg)

Un mouvement de la main et une autre balle monte pendant que je choisi une autre cible.
Un sanglier que j'estime à 50kg passe entre deux chênes vert, je devance sa course, et l'attends à l'éclaircie d’après. Lancé comme une bombe, il a le malheur de passer là où je l'attendais. Blam ! Il s’effondre à son tour.
Je monte une autre balle dans la chambre quand du coin de l'oeuil, je vois le dernier sanglier se relever. Je pivote pour me replacer et lui lâche une balle au coup d'épaule. Blam! Manquée.. je réarme la pompe.

Je garde un oeuil sur le sanglier blessé, il remonte vers moi. Une seule priorité pour moi: l'achever rapidement.
J’enlève le chargeur vide, car j'ai lâché mes 5 balles. Je le mets dans ma poche et en enquille un autre de 4 coups, alors que 2 sangliers de 40kg, ne sachant pas d'où viennent les coups de carabines, se sont arrêtés à 10m de moi en plein travers.
Le sanglier blessé s’arrête lui aussi à une vingtaine de mètres. Placé de 3/4 face je prends mon temps et vise. Le point rouge se place sur la tête : CLIC!
Les deux sangliers arrêtés à coté de moi réagissent au bruit entraînant un départ immédiat du blessé qui repart de plus belle à la montée, suivant ses congénères. Quel con j'ai fait en mettant le chargeur. Réarmer avant de mettre le chargeur : bilan j'ai bien éjecté la douille mais la chambre était vide.

Je réarme en montant une balle et lui en lâche une quand il rentre dans un cade. Balle de patte.  
Je réarme, le suis au bruit et cherche à l’apercevoir. Entre deux autres cades je lui lâche une autre balle. Il n'en fait pas cas. Au bruit je sais qu'il bifurque pour redescendre vers moi. Il s’arrête derrière un cade je l'entends souffler. Il repart aussi vite qu'il est monté. Une détonation claque quand je l'entrevois passer et je remonte une balle dans la foulée. N'entendant plus rien je pense l'avoir enfin achevé. Je baisse la carabine, tend l'oreille quand il me ressort à 20m en plein travers à la descente.
Je lui envoi ma derrière balle. Il crie et je vois clairement le train arrière s'affaisser avant qu'il rentre dans des buissons.
J’enlève le chargeur vide, et en remet vite 3 dedans.
Le sanglier est dans une matte de chênes vert et je ne l'entends plus bouger.
Il m'aura littéralement tourné autour.

Un traqueur au loin m'interpelle, je lui réponds et attends son arrivé. Je me refais la scène dans la tête. 2 de morts, je les vois de mon poste. Le gros lui je ne l'entends plus. Je sais qu'il a pris au moins trois balle. La première dans le 1/3 avant et que je pense bien placée, la balle de patte et la dernière un peu en arrière. Au total je lui ai envoyé 6 balles.

Régis arrive prêt mon poste "Oooh! C'est la guerre ici! T'en a fait ?"
"Oui, 2 là bas et …."
Des craquements dans la mattes de chênes  me font dire que le 3éme sanglier repart  
"Merde le 3éme est blessé ! Il est dans la matte de chêne qui est là!"
"Gros?"
"50-55 kg"
"Bouge pas j'y vais"

Le piqueur charge son juxtaposé et descend dans la matte de chêne.
Blam !
« Pu… je l’ai loupé, il se barre».
S’ensuit une course poursuite avec le piqueur ponctué de jurons et de deux autres coups de fusil.
Après 5-6mn Le piqueur revient alors à mon poste.

« C’est bon je lui ai mis une balle dans la tête. Il est au fond du petit ruisseau au bord du chemin. Il est percé de partout ton sanglier ! »
«  Oui …»
Coupé par une sonnerie de téléphone le piqueur répond et repars immédiatement.
« Il y a en 3 de morts, arrêtez les chiens et dès qu’on les a, on sonne la fin »

16h40 : la fin de la battue est sonnée. Je descends du mirador et commence à sortir les 2 premiers sangliers en attente d'un peu d'aide.
Une fois les deux premier sangliers regroupés, je descends voir ma première balle car je ne voudrais pas en avoir blessé un sans le rechercher mais sur place aucune goutte de sang et je la retrouve laminée dans le sol meuble.

Les renforts arrivent 4 personnes au total. On va chercher le gros.
Ne le trouvant pas dans le ruisseau au bord du chemin on entreprend de suivre le sang à partir de l’endroit de mon premier coup de carabine sur le gros. Régis ne répond pas au téléphone. mais où l'a t'il fini?
On est 5 à chercher le sanglier mort. Ne le trouvant pas là où l'on me l'a indiqué, on forme deux équipes est l'on est deux à repartir du dernier endroit où je l’ai vu au cas où je me serais loupé et qu’il y en ai un autre de blessé/mort.
Pendant que 3 copains cherchent et fouinent dans toutes les mattes de chêne au fond des ruisseaux et autre, on remonte la piste de sang jusqu'à arrivé à ma dernière balle. C’est bien la même piste et le même sanglier.
On continue les recherches mais impossible de mettre la main dessus. Le piqueur ne répondant pas au téléphone on continue les recherches en suivant au sang.
Au bout d’un moment, perdant le sang, un piqueur pour une fois posté est allé chercher un de ses chiens qui le fait bien.
Avec tous les sangliers qui sont passés dans les environs (la compagnie comptais bien 10 à 15 sangliers + la laie et les 2 petit marcassins), on ne savait plus si le chien suivait la bonne piste car ça ne correspondait pas aux indications initiales.
Suivant le piqueur, carabine déchargée dans le dos, au bout d’un moment qui nous semble une éternité, le chien retrouve le sanglier, comme indiqué, au bord d'un chemin au fond d'un radaillon.

Arrivé à quelques mètres du sanglier, il se relève et nous charge, le chien et le piqueur arrivent à éviter la charge de peu. Situé 1 mètre en arrière, le sanglier fait alors demi tour en me voyant prendre ma carabine et prend de nouveau la fuite.
Le piqueur se relève et cri aux autres qu’on lui amène un fusil car lui-même n’est pas armé, (nous cherchions un sanglier mort avec une balle dans la tête   .).
Je lui tends ma carabine et un chargeur avec 4 balles. L’étonnement passé (il n’avait pas vu que j’avais ma carabine dans le dos) il me dit de charger mon arme et on reprend la poursuite.
On reprend la poursuite, suivant de près le piqueur et son chien. Le chien s’arrête, lève le nez, le sanglier s’est calé dans un petit radaillon. On sait qu'il est là, on fait quelques pas, on le cherche dans la végétation. De nouveau il monte vers nous pour nous charger, le bruit de fermeture de la culasse lui fait faire demi tour et repart mais impossible pour moi de le tirer à ce moment là.
Le piqueur me donne la dit "Tire le tire le!" mais avec la végétation "Je le vois pas!!". Je suis pourtant à 1m de lui sur le coté . Il se couche sur le coté plus qu’il ne se pousse en m’indiquant le sanglier du doigt qui part le long d’un talus. Un bond de coté à mon tour pour arriver juste à coté de lui, penché sous les branches d’un chênes vert, je réussi à voir la bête et je lui lâche une balle. Il tombe avec une balle de cou.
On se rapproche du sanglier. Il est allongé mais quand le chien arrive à son niveau il a encore un soubresaut et claque des mâchoires.
Cette fois s’en est trop, en une fraction de seconde la carabine est dans les mains du piqueur. La dague à la main je prends le sanglier par une patte arrière et le pique au cœur. Cette fois c’est bel et bien la fin.

On se regarde avec le piqueur, on sourit de la petite frayeur lors de la charge. On ne s’attendait pas du tout à le trouver vivant alors qu’il avait, soit disant, une balle dans la tête.
On appelle les autres. Quand le piqueur ayant fini le sanglier arrive à son tour.
Ils le chambrent pendant que je regarde les balles qu’il a pris.

Une balle d’apophyse (la première à n’en pas douter), une à la patte, la troisième comme je le pensais. Une dans les reins, la dernière que je lui ai envoyé, un trou d’entré d’une autre balle pleine épaule et une dernière sous la colonne au milieu du corps. Avec celle de cou, c’est bel et bien 6 balles sur 7 qu’il aura reçu !!      
La nuit approchant, on se dépêche de charger tout ce petit monde dans les 4x4.

Au cabanon il affichera 62kg. Lors de la dépouille, je trouverai deux balles déformées, une sous les cotes, l’autre bloquée conte la colonne. Elles ont certainement dut prendre une branche avant de pénétrer le sanglier mais en ayant perdu de leur force d’impact.
Le foie est touché et un poumon est mâché, perforé de part en part avec une grosse hémorragie et de gros caillots de sang. Je n’ai pas le temps de terminer mon autopsie, les gars sont pressés de rentrer et ils me pressent pour en finir dommage.

Une fois les piqueurs rentrés j’ai appris que ce sanglier avait été mené plus d’une heure avant de se mettre au milieu d’une compagnie. Il a même été pris une fois par 3 chiens après avoir fait face mais relâché par les chiens.
Etait t’il bourré d’adrénaline au point de faire abstraction de ses blessures pourtant mortelles ?
Aucune idée, mais de l’adrénaline, il m’en aura donné plusieurs fois, et aux piqueurs aussi.    

Et bien , tu parles d' une journée

Du suspens, de l'action, de l'adrénaline, des tirs, plus de batteries dans la gopro, des photos flous tout pour plaire
Mais une super journée

Merci pour le partage .
Ouahhhhh.......................Une sacrée journée .

Beau récit mais tu tires avec quoi

Quelle journée, tu t'en rappelleras ! Bravo !

9 postés, te plains pas, chez moi c'est beaucoup

Merci pour les commentaires.
J'ai une 7600 en 280 remington. Dans le premier chargeur: 3 gpa, 2 ppdc de norma. Dans le second 2 gpa 2 ppdc.
Je mixe car j'ai un restant de boite en ppdc et vu que les dernières balles ne servent souvent à rien...
Par contre, au vu des deux balles que j'ai retrouvé déformées mais pas expansées, je peux garantir que les gpa ne pétalisent pas quand elles tapent du dur. J'en ai eu encore la preuve ce week end même si je le savais déjà.

merci de ce retour très interessant.....

Vu la distance de tir je suis quand même très surpris de voir une balle se loger contre la colonne sans l'exploser  

Moi aussi, mais si comme je le pense elle a traversée un tronc de cade de 15 20 cm de diamètre,  je suis déjà étonné qu'elle l'ai transpercée. C'est le bois le plus dur que je connaisse (et quasiment imputrescible). On l'utilise pour faire les mirador chez moi.
Je regrette de ne pas avoir pu continuer mon autopsie tranquillement, mais bon, je pouvais pas les faire traîner plus longtemps.

Tiens pendant que j'y pense. Voilà des photos d'un tir effectué l'année dernière à travers un arbre. Le sanglier n'a pas eu de chance car la balle a traversé le tronc de chêne vert et l'a touché. Il n'aura fait que 50m avant de mourir.


Le bois était aussi moins dur...

Et voici les images du poste où je me trouvais. Je ne mettrai pas ma photo des 3 sangliers car elle n' à rien d'artistique.
Le haut de la pente:

A ma gauche

À ma droite

Derrière moi:

Dragoon ,
Quel est l' arbre que tu appelles cade car je ne connais pas ce nom d' arbre
Autre chose , c' est quoi une matte

Les cades, c'est le genevrier et une matte c'est une touffe de chêne, enfin je crois.

Salut,
@yaute, à tout juste
Le cade c'est bien une espèce de genévrier : genévrier cade (Juniperus oxycedrus). On en a beaucoup vers chez moi. Les mattes c'est effectivement une "touffe", de chênes, de cades ou autre.

Pendant que j'y suis,
Un "marassou" c'est un marcassin en patois
Les "fadas" c'est les fous (on l'est tous un peu non?)
Une coucourde c'est une courge
"c'est le panard" c'est le pied mais ça vous devez tous connaitre
Il "plausigne" : il bruine
Vermès c'est le nom d'un bois qui doit faire 300ha cadastral donc avec les pentes bien plus encore.