Durer encore un petit peu !!!

Il y a quelques jours que l'ouverture a réellement débuté, on est seuls avec la chienne Irina...
Pas une palombe, pas un lapin, pas un seul gibier, la chienne est sortie de main, elle revient avec la langue pendante, effrontée !!!
C'est plus fort qu'elle, je me refuse à recourir au collier électrique, il faut qu'elle le fasse 2 ou 3 fois encore la saison, le reste du temps elle chasse beaucoup mieux avec moi, c'était sûrement un chevreuil...
Pour se faire pardonner, " la vieille" s'applique, d'ailleurs le bout de queue s'agite un peu, mais ce n'est pas net, elle vire, elle tourne, elle s'énerve... il n'y aura pas d'arrêt. Trop tard, à plus de 60 mètres un coq de perdrix rouge s'élance en chandelle à la manière d'une bécasse, presque à la verticale...
Le coup de fusil est risqué, je tire bien au dessus quand il atteint les dernières cimes, soit je touche la tête, soit il repart indemne... il ne tombe pas, pas une plume, tant mieux...
Par contre ce n'est pas un cri de perdreau mais une véritable gueulante à plus de 300/400 mètres de là, zut, j'ai fait une conn....? je m'avance vite, la chienne croit qu'on va chercher le perdreau, elle commence à sauter dans tous les sens pour repérer l'effluve...
Au beau milieu du bois, il y a Monsieur, tout rouge, et Madame...
- Vous avez crié ? ...il y a un soucis ?
C'est elle qui répond à chaque fois, lui il n'a jamais rien dit, il me semble qu'il se remet de ces émotions...
- Oui, les plombs, ils sont retombés pas loin...
- Ah bon, c'est possible, mais j'étais loin et le tir était haut, s'ils sont effectivement retombé pas loin, ce n'est pas dangereux, milles excuses en tous les cas...
- Nous vous savez, on n'y connait rien, tout ce qu'on veut, c'est durer encore un peu... vous avez tiré quoi ?
- un perdreau...
Et vous l'avez eu ?
- Non...
- C'est comme nous, les perdreaux ce qu'ils veulent, c'est durer encore un peu !

Je trouve l'affaire cocasse, je ne sais plus quoi dire... je pense très fort que vu la situation, si moi j'ai raté mon coup, le bonhomme qui ne dit rien, lui, il n'a pas dû rater le sien... à moins que le coup de fusil n'ait arrêté ses ardeurs... d'ailleurs il est de moins en moins rouge, il blanchit à vue d’œil.
Pour terminer je dis la première banalité qui me vient à l'esprit:
- Vous êtes d'ici ?
- Non... on y était...
- Je vous laisse alors...
Je n'ai même pas essayé d'en savoir plus sur le fameux " on y était "mais j'ai gardé cette phrase dans ma tête " nous c'est comme les perdreaux, ce qu'on veut c'est juste durer encore un petit peu "

Du coup, on rentre, on verra un autre jour pour le perdreau...

Pour la petite histoire, quelques jours plus tard, on remet les pieds dans le secteur. Après une passée sans miracle à quelques encablures, j'entends distinctement le coq qui rappelle, mais c'est hyper sale, à peine la chienne rentre dans le maquis qu'il décolle, cette fois à belle distance, intirable.
Je le regarde filer avec un peu d'amertume, mais bon, c'est la chasse... la chienne n'est pas du tout de cet avis, elle insiste dans le sale, comme c'est impénétrable j'assiste impuissant " à la menée", car cela ressemble à une menée, je devine que peut être un perdreau attiré par le coq est resté là, et que maintenant ça vire et ça tourne, sans décoller... du coup je me place à une sortie... c'est à dire juste un pas de souris entre deux cacafoutchis...
Et c'est presque dans les pieds qu'une grosse mémère de perdrix complètement affolée vient s’échouer et décolle...

Peuchère, celle là elle n'a pas eu beaucoup plus de temps " pour durer un peu plus" !

Quant au coq, le saligot, à tous les coups il a fait sa petite affaire et ensuite il a sauvé ses plumes... celui là il a compris comment il faut faire " pour durer encore un peu"

Super récit !!

Merci Jean-Paul!
Ce genre de petit dialogue à double sens me rappelle un beau matin d'automne alors que j'étais encore minot et que je suivais mon père à la chasse comme son ombre... Sur le petit chemin, nous rencontrons un couple et le mari, qui ne semblait pas avoir inventé la poudre, lance à mon père un "Nous prenez pas pour un pigeon hein!" ponctué d'un rire bien gras, apparemment bien fier de sa trouvaille...  Du tact au tac, mon père lui a renvoyé: "Vous inquiétez pas, vous volez pas assez haut!" On en reparle encore quand on se rappelle des souvenirs de chasse!

Excellent !
Je pense que cela arrive régulièrement de rencontrer un couple en galipettes pendant qu'on chasse !
moi c'était un couple d'Allemand qui est sorti d'un fourré à peine rhabillé car ils étaient tombés nez à nez avec des sangliers alors que j'étais à l'affût.
Il m'ont gentiment demandé si les sangliers étaient dangereux !
je leur ai répondu, peut-être mais qu'ils se posaient aussi la même question.
Amicalement.
JP

J'adore !

Voila pourquoi j'aime PLC a lire ce genre de récit merci Jean_Paul

Merci du récit, sympa de faire partager.

Excellent

@Jean-Paul13 merci beaucoup pour ton récit , tout y est le fond, la forme et l'esprit PLC !!

Bravo, quelle maîtrise du verbe ! Merci pour cet agréable moment Jean-Paul !

Merci Jean-Paul magnifique récit

Jean-Paul !