Comment j’ai appris à viser !

J’étais bien petiot, souffreteux, cantonné dans ma chambre en plein été, à deux pas de la mer.
C’était à Toulon, c’est ma grand-mère, une petite femme toute maigre et toute bossue qui m’élevait (oui, celle de la « poule à mamie »…)

Les distractions étaient très-très réduites, lecture, lecture et lecture. Ca a du me donner le gout des mots, de l’encre, de l’écriture, mais bon, pour un gamin un peu insuffisant.
Alors, comme tout gamin qui se respecte, je me suis imaginé un monde avec les bons et les méchants, le bon, moi évidemment, et les méchants les gens qui passaient dans la rue en bas et qui allaient ou revenaient de la plage.

On était au deuxième étage, j’ai pris une pipette d’eau et le premier passant est passé sans encombre, les gouttes d’eau se sont étalées sur l’asphalte à la façon de traces de balles sur le sable, mais trop derrière…

J’ai rapidement appris ainsi, sur le tas, en autodidacte, les fondamentaux de la balistique : caché derrière les volets, avec une grosse seringue remplie d’eau en guise de mitraillette (oui, j’ai changé de calibre, de la pipette à la seringue, une de celle qui servait à m’enfoncer la grosse aiguille, mais sans l’aiguille).
Après quelques succès sur les piétons, il a fallu passer aux choses sérieuses, corser un peu le jeu et améliorer le tir.

C’est ainsi que j’ai du calculer au plus juste les trajectoires, vitesses, temps de réaction pour arriver à ce que les gouttes d’eau parviennent sur les pares brises des voitures qui descendaient la rue à fond la caisse.
Ca marchait de mieux en mieux, chaque coup de seringue tapait au but, ou presque.

En ce qui concerne le temps de réaction j’ai pu constater qu’il était très variable : certains faisaient comme si de rien, pensant à une crotte de pigeon ou de moinillon, d’autres levaient la tête et cherchaient vainement le fauteur de trouble…ou le nuage dans ce ciel si limpide en période de vacances d’été.

Mais celui là…il en avait pris plein la figure, et pas qu’une seule fois.
J’avais bien repéré sa décapotable, lui nonchalamment bouffon, le bras mollement posé sur la portière, elle, cheveux aux vents et riant toujours plus fort quant le bolide descendait la rue.
Le premier coup, les gouttes d’eau n’ont atteint que la Miss pendant qu’elle avait la bouche grande ouverte à rire, le second, le lendemain, ils en ont pris tous les deux, le troisième ça a été l’arrosage intégral car j’avais mis le maximum d’eau possible, au bout de la graduation de la seringue.

Et le bolide s’est arrêté un peu plus loin.

Le gars est monté, sans hésitation, il m’avait repéré derrière les volets.
Sonnette.
J’avais le cœur qui battait à deux cents à l’heure, j’étais fait, j’étais cuit, j’allais aller en prison, c’est sur.
Il est tombé sur ma grand-mère, la mamie de 35 kilos toute habillée, ratatinée, bossue.
Elle a fait l’étonnée, ils parlaient tous les deux, j’entendais comme je pouvais, au début il gueulait, puis il parlait de moins en moins fort.
J’ai juste entendu à la fin
-Mais qu’il arrête ça, au revoir madame.

Mamie est venue dans ma chambre, elle m’a asséné le plus gros mot qu’il m’a été donné d’entendre de sa bouche :
-Tu n’es qu’un voyou des rues !

Sauf que justement dans la rue je ne pouvais pas y aller encore.

En tous les cas, j’ai bien appris les temps de réaction, le swing, les vitesses et les trajectoires, et pour pas cher…

Quelques gouttes d’eau !

pas mal ; pas mal

"Un voyou des rues"! J’espère que tu t'es fait tout petit car dans le registre des insultes, il ne devait pas y avoir grand chose de plus méprisant a l’époque...
Encore une bonne histoire toujours aussi bien contée JP!
(Et qui prouve que la vélocité du projectile n'a rien a voir avec la précision, c'est le tireur qui compte! La même règle s'applique aux cartouches...)

chris01 a écrit:salut J.P.,
encore une bien sympa, comme quoi, l'entrainement çà paie mais tu aurais du mettre de l'encre (surtout pour la décapo), histoire d'analyser l'impact.

J'avais bien imaginé de l'eau dans un sac en plastique -type grenade à l'eau- mais j'avais pas osé!
Par contre on l'a fait plus tard en " bizutage", on s'en ait envoyé pas mal, et ça ne fait pas mal non plus à condition de limiter quand même la taille des sacs bien sur, à l'époque le bizutage ça restait correct...avant que ça dérape et que cela soit interdit.

Avec tout ça on est bien loin de la chasse, pourvu qu'on rigole un peu tu as raison !
a+

Le préservatif est excellent en bombe à eau !... Mais là, on est dans le gros calibre !

Le préservatif ! Pas mon .... !

Voilà, voilà! Quand j'ai écrit " comment j'ai appris à viser" il s'agit de viser pour mes activités futures de chasse, et ça n'a pas raté, on part obligatoirement sur d'autres types de cartouches !!!, les flatulences pour le post de brut de cueille

vous n'êtes pas sérieux 30 secondes !

normal qu'après je suis aussi en "déviance" et que les histoires n'ont plus qu'une relation lointaine avec la chasse ... je suis parti en c...... d'abord avec "pour être du gros c'était du gros" puis " une double rencontre ou la cagagne" et maintenant avec " brut de cueille".

Je sais pas si je dois recadrer ou tans pis si c'est moins chasse, je vais quand même pas faire un sondage!
a+
jp

Pourquoi recadrer ?? Maintenant que tu nous as ouvert ton livre d'histoire, faut continuer !! Y aura bien un moment un lien direct avec la chasse !! Déjà que je vois clairement le lien entre tes activités passionnantes de lecture chez Mamie Bossue et ta manière de raconter tes histoires !! Y a pas de doute !! Tes vacances chez ta grand-mère ont marqué ton esprit !!

Merci de ta réponse, j'en réfère à Setteroman dans " brut de cueille" à l'instant ! Il doit me donner l'absolution !!!