Dordogne La FDC réstaure un milieu menacé

En Périgord noir, les vallées de la Grande-Beune et de la Petite-Beune abritent de nombreuses espèces protégées. La première va de Saint-Geniès aux Eyzies, la deuxième de Saint-André-Allas aux Eyzies. Après une quarantaine d'années d'inertie administrative, ce milieu humide était à l'agonie, devenu un bas marais alcalin en voie de disparition du fait d'un assèchement rapide. Ces deux vallées (ou beunes) ont pourtant fait l'objet de plusieurs mesures conservatoires, notamment des classements en zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique (Znieff) ou encore en zone de protection spéciale. Les 5 600 hectares concernés (dont 440 en habitat protégé) sont placés de surcroît depuis 1998 au centre du dispositif Natura 2000.
Acteurs de la ruralité

Dans certains secteurs, les agriculteurs locaux se sont engagés sur des pratiques adaptées (fauchages tardifs, conversion de terres arables en prairies, etc.). Mais aujourd'hui, les beunes bénéficient de soins particuliers, dans le cadre d'un partenariat unique entre la Chambre d'agriculture et la Fédération départementale des chasseurs. Ceux-ci ont à cœur de défendre ce site, remplissant ainsi le double rôle qu'ils revendiquent d'acteurs de terrain et de défenseurs du monde rural.

« Dès 2004, la Fondation nationale pour la protection des habitats de la faune sauvage (1) a fait suite à un dossier déposé par Claude Villate, chargé de notre communication, explique Michel Amblard, président de la Fédération départementale de chasse. Elle s'est porté acquéreur, sur ses propres fonds, de 37 hectares de beunes situés sur les communes de Meyrals et des Eyzies. Nous avons ensuite établi un plan de gestion en adéquation avec le document d'objectifs de Natura 2000, avant de réaliser, en 2010 et 2011, les inventaires et diagnostics écologiques. Les travaux d'ouverture du milieu ont démarré fin 2011. »
Des espèces rares

Financé dans le cadre de Natura 2000, le chantier doit permettre, à titre expérimental, d'endiguer la végétation sur 5 hectares.

Abattage et broyage, mécaniques ou manuels : c'est un travail de titan pour débarrasser l'espace des aulnes, saules et bourdaines trop envahissants. Il s'agit de laisser croître dans la lumière les herbacées, appelées ici « fenasses », « utilisables comme litière pour les animaux », précise Jean-Marie Laval, directeur du CRDA du Périgord noir, l'antenne locale de la Chambre d'agriculture.

Le but est de faire revenir l'eau, et ainsi de sauver les habitats d'une faune et d'une flore spécifiques et remarquables. On recense en effet ici, entre autres, des espèces rares : l'agrion de Mercure (une libellule), le damier de la Sucisse (un papillon), le martin-pêcheur ou le butor étoilé (des oiseaux), la lamproie, les loutres et deux espèces d'orchidées, le liparis des marais et la spiranthe d'été.

L'ouverture de ce milieu, placé sous observation, crée un nouveau territoire à reconquérir pour toutes ces espèces, au cœur d'une portion de vallée qui appartient désormais de plein droit à tous les chasseurs, gestionnaires de fait : une expérience unique en Dordogne.

(1) Cette émanation de la Fédération nationale des chasseurs est propriétaire de 7 000 hectares en France, majoritairement inscrits comme des étapes de migrateurs.